MIGUEL MANARA 615
l'éclat de miroir et le balai : elle regarde hébétée son ventre de marâtre,
et pense tout soudain au grincement du puits.
(Silence.)
Seigneur, Seigneur, donnez-nous notre espoir quo- tidien !
O Père et Fils, donne-nous notre courage quo- tidien !
Comme le mendiant lépreux, le dos collé à la muraille, tend son écuelle vers la soupe,
ainsi tendrai-je mon jeune cœur vers la chaleur embaumée de l'amoureuse vie !
Donnez-moi ma ration quotidienne d'amour et mesurez-la moi très généreusement,
à cause des autres :
afin que j'aille, repu, vers ceux qui ne vous aiment pas et qui m'insultent ;
et que je dise : telle est sa libéralité. Car ce ne sont point là ses dons du cœur,
mais seulement les miettes balayées de sa nappe ;
et voici ce qui reste dans l'écuelle du serviteur indigne et repu.
O rue ! ô ville ! ô royaume ! ô terre ! viens et mange !
Car tel est le Très-Haut, car tel est le Seigneur Amour !
Je suis Manara, celui qui ment lorsqu'il dit : j'aime.
Et parce que j'ai dit à l'Eternel que je l'aimais, mon cœur est joyeux et mes mains
�� �