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m'envoyer, s'il vous est possible et s'il vous plaît, un exemplaire de vos G...[1], que je voudrais relire et qu'il m'est impossible d'acheter, ma mère ne m'ayant gratifié d'aucun rond de bronze depuis six mois, — pitié ! — : enfin, veuillez bien me répondre, quoi que ce soit pour cet envoi et pour le précédent.

Je vous souhaite un bon jour, ce qui est bien bon. Écrivez à : M. Deverrière, 95, sous les Allées, pour

A. Rimbaud.



III


Parmerde, Juinphe 72.

Mon ami,

Oui, surprenante est l'existence dans le cosmorama Arduan. La province, où on se nourrit de farineux et de boue, où l'on boit du vin du cru et de la bière du pays, ce n'est pas ce que je regrette. Aussi tu as raison de la dénoncer sans cesse. Mais ce lieu-ci : distillation, composition, tout étroitesses ; et l'été accablant : la chaleur n'est pas très constante, mais de voir que le beau temps est dans les intérêts de chacun, et que chacun est un porc, je hais l'été, qui me tue quand il se manifeste un peu. J'ai une soif à craindre la gangrène : les rivières ardennaises et belges, les cavernes, voilà ce que je regrette.

Il y a bien ici un lieu de boisson que je préfère. Vive l'académie d'Absomphe, malgré la mauvaise volonté des garçons ! C'est le plus délicat et le plus tremblant des habits, que l'ivresse par la vertu de cette sauge des

  1. Le recueil Les Glaneuses.