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LA LITTERATURE 495

��L'inventaire sentimental des provinces françaises n'est pas près d'être épuisé. Le prestige de M. Barrés fait aujourd'hui de chacune de nos montagnes, et même du Mont-Blanc, une colline de Sion-Vaudémont. Les écrivains piochent leur sol natal avec ardeur, et ils y trouvent, en attendant le second trésor qui équilibrera Les Bastions de rEst, les récompenses de l'Académie Française. Tout cela est excellent, et le visage, parfois ironique, de la vérité, nous rappelle que ce mouvement, après tout, ne date pas d'aujourd'hui, et que son initiateur est un homme du XVIIP siècle, et que cet homme-là c'est Jean- Jacques Rousseau. Les poètes du XVI* siècle chantaient leur Vendômois ou leur petit Lire, et cette musique locale disparut définitivement de notre littérature avec Malherbe. Pas une ligne de leur œuvre ne nous montre que Malherbe ait con- science d'être Normand, Pascal Auvergnat, Bossuet Bour- guignon. On ne se vante que d'être Parisien, et Boileau et Voltaire n'y manquent pas, ou encore de n'être pas Gascon, un mérite évidemment, mais tout négatif. Le premier homme qui ait eu une petite patrie, et qui l'ait fait sentir dans ses livres, et qui l'ait mise à l'horizon de ses œuvres, c'est Rousseau. Le premier écrivain qui se connut à Paris comme un déraciné, qui sentit le besoin de trouver des racines dans l'imagination de sa terre maternelle, c'est Rousseau. La Bretagne de Chateau- briand, le Maçonnais de Lamartine, les pages abondantes oii tous deux ont pour la postérité employé à draper leur stature les horizons natals, toute cette musique, qui dérive de La Nouvelle Héloise, continue d* " extravaguer " jusqu'à nous. M. Léandre Vaillat, qui a consacré à Rousseau les meilleures pages de son livre, doit saluer volontiers le fondateur du genre que, lui centième, et l'un des bons, il cultive.

M. Vaillat est un bon écrivain plutôt que son livre n'est un bon livre. Il lui est arrivé ce qui arrive à tant de disciples de

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