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424 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

entre deux pierres innocentes,

plus charitables que les mamelles de ton amour ?

Tu me dis, Douleur, que tu es ma Mère. Mais si tu l'es vraiment, tu dois bien savoir quel enfer se lamente là, ma Mère, quel enfer se lamente là, dans ce vieux cœur.

Est-ce pour cela que tu m'as bercé

les nuits d'hiver, au clair des cheminées

où pleurait le temps orphelin ?

Dis, est-ce pour cela que tu m'as bercé

avec des larmes et du rêve dans tes tristes yeux,

dans tes chers yeux couleur de voyage et de vent .

Tu m'as couché dans un berceau :

que ne m'as-tu jeté dans un cercueil !

Tu as baisé mon corps des petits pieds à la pauvre

tête : que n'étais tu pareille aux bêtes des bois qui étranglent leur portée, ô ma Mère !

Maudite soit votre douceur, ô vous qui m'avez enfanté dans la douleur ! Maudit soit votre ventre, maudit soit votre sein,

ô vous qui m'avez donné ce triste corps, ce solitaire cœur !

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