MIGUEL MANARA 397
ailleurs que dans la tête d'un Messie fou ou d'un
mauvais moine. Mais nous savons qu'il est, dans l'espace vide de
Dieu, des mondes illuminés d'une joie plus chaude que
la nôtre, des terres inexplorées et très belles, et loin, bien
loin de celle-ci où nous sommes. Faites donc choix, je vous prie, d'une de ces lointaines et charmeuses planètes et m'y envoyez, cette nuit-même, par la porte
vorace du tombeau. Car le temps est long; car le temps est terriblement
long. Messieurs, et je suis las étrangement de la chienne de vie que voilà. Ne point gagner Dieu, c'est vétille, à
coup sûr, mais perdre Satan, c'est douleur grande et ennui
vaste, par ma foi. J'ai traîné l'Amour dans le plaisir, et dans la boue,
et dans la mort ; je fus traître, blasphémateur, bourreau ; j'ai ac- compli tout cela que peut entreprendre un pauvre diable
d'homme et voyez ! j'ai perdu Satan. Satan s'est retiré de
moi. Je mange l'herbe amère du rocher de l'ennui. J'ai besogné Vénus avec rage, puis avec malice et
dégoût.
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