CHRONIQUE DE CAERDAL 329
monie, et il les y meut, n'ayant plus d'autre loi, sinon qu'ils s'y avancent et qu'ils s'embellissent.
Vertu féconde : la danse est l'action heureuse, et la joie l'embellit. Elle semble inextinguible, comme le désir du bonheur. On ne croit pas à la fatigue de la danseuse, non plus qu'à celle de l'étoile dans l'espace des nuits. L'Espagnole, pos- sédée par son dieu, prend des forces dans sa lassitude même ; et jusqu'à ce qu'elle tombe, comme elles font recrues d'amour, dans un profond sommeil, sa flamme se renouvelle à son bondisse- ment.
La danse réalise l'arabesque. Le beau corps qui se meut n'est plus qu'un son jaillissant de son propre accord, une note de sa mélodie. Et la mélodie est continue.
Quel art est plus sacré ? Une belle danse est l'office de l'Olympe. C'est la plus ancienne liturgie. Nous ne pouvons nous y dérober : toute chair est païenne. La danse est l'incantation de la volupté par une blanche magie.
§
Entre tous les spectacles, si la belle danse n'est pas le plus beau, elle est du moins le plus spec- tacle. Par là, elle délivre.
L'homme se fait tout spectateur. Dans le lac des yeux, toute pensée flotte, ou dort, ou se noie.
�� �