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LE MATADOR DES CINQ VILLES 299

m'étais rapproché d'elles et étaient maintenant remplacées par de gigantesques animaux humains impossibles à reconnaître, mais encore vêtus, toutefois, des maillots et des culottes des poupées.

Stirling, d'un hochement de tête avertisseur me désigna un homme qui n'était pas à dix pieds de distance de moi. C'était donc Myatt, le héros de l'armée, le bien-aimé des populations. Je levai mon regard vers lui. Sa bouche et son genou gauche étaient rouges de sang, et, depuis ses cheveux en désordre jusqu'à ses énormes souliers, il était tout maculé d'épaisses plaques de boue. Ses yeux bleus avait un regard lourd, stupide et honnête, et de ces trois qualités, c'était la stupidité qui prédominait. Il paraissait être tout en pieds, en genoux, en mains et en coudes. Sa tête était très petite ; c'était tout ce qui restait en lui de la poupée.

Un petit homme l'aborda, sachant bien — et montrant un peu trop qu'il le savait — qu'il avait le droit, lui, d'aborder le héros. Myatt le salua d'un signe de tête.

— Tu lui as donné son compte, à ce qu'il paraît, Jos ! dit le petit homme.

— Ma foi, dit Myatt avec lenteur et amertume, est- ce qu'il n'avait pas demandé et supplié qu'on le lui donne, tout l'après-midi ? Est-ce qu'il ne le cherchait pas encore à l'instant ?

Le petit homme opina. Puis il dit d'un ton plus bas :

— Et la dame, comment ça va ?

— Rien encore, dit Myatt, autrement je n'aurais pas joué !

— J'ai parié contre Watty une demi-couronne que ça ne sera pas un garçon, dit le petit homme.

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