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��LES REVUES

Sur Strindberg...

M. Frédéric BOOk dans la Revue Bleue (i" juin) :

" Et Strindberg concentra sa sagesse dans le mot amer de la Sainte-Ecriture : " J'ai travaillé en vain, j'ai épuisé ma force en vain et sans utilité. "

Des périodes d'autocritique farouche, Strindberg en a eu plusieurs. Toute sa vie n'a été qu'une série de procès, contre les autres, contre la société, et contre lui-même ; l'instruction a été sommaire et l'arrêt sévère, inébranlable, comme il arrive facilement quand le témoin, le juge, l'accusateur, et souvent aussi l'accusé, sont le même individu colérique. Le champ de bataille de la vie et des luttes de Strindberg ne ressemble à rien tant qu'à une vieille plaine militaire suédoise, perdue dans les grandes forêts : sillonnée, usée, pelée par des marches en avant et en arrière, innombrables et sans fin, par des demi-tours et des changements de front. L'air y retentit d'insultes, de querelles et de commandements tonnants ; mais, malgré tout, il y a là quelque chose d'émouvant, et le vent en rapporte les psaumes rudes des guerriers protestants, pleins d'une religiosité primitive.

Nul n'a probablement jamais éprouvé autant de facilité que Strindberg à changer d'opinion. Un perpétuel va-et-vient a toujours traversé le foyer de son âme. Là, Darwin et Spencer ont été conduits au siège d'honneur un jour, pour être mis à la porte, un autre, d'un geste expressif ; là, la science a été adorée à genoux comme dispensatrice de tous les biens, pour être une

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