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194 l'A NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

11 déplorer au contraire si héroïque et si vaine sujétion qui n'aboutit qu'à donner aux chefs-d'œuvre quelques répliques dénuées d'authenticité ? — On célèbre en Ricard un héritier du métier des grands peintres : mais autant de peintres, autant de métiers, et n'est grand peintre que celui qui réinvente son métier, du moins dans une certaine mesure. Ce n'est pas à dire que Ricard n'eût pu produire des chefs-d'œuvre avec le métier des maîtres passés ; mais sa servitude va plus loin encore : c'est leur esprit, c'est l'esprit de leur temps qu'il s'ingénie à pasticher ; loin de se soumettre à l'objet, au modèle que lui propose la vie, il le transporte dans le passé ; distinction, plénitude, mystère, autant de caractères empruntés à Van Dyck, à Titien, à Vinci, dont il affublera ses personnages. C'est pousser le respect à bout. Non, il m'est impossible d'admirer le portrait énigmatique de M™** de Calonne, celui de M"^^ Henry Fouquier, autrement qu'un Dagnan-Bouveret " de la bonne époque ". Non, notre admiration ne se portera pas sur les portraits à bon marché singuliers que désigne la voix publique. Aussi bien n'était-ce là, le sait-on ? qu'une période préparatoire. Qu'on suive au Jeu de Paume, la chronologie des peintures. On s'étonne de trouver là un grand portrait, clair et libre, aussi vivant que précieux, aussi proche de nous que sont distants les autres, le portrait de M.^^ Stephenson, lequel n'est pas même catalogué. On s'étonne d'apprendre alors que c'est là le dernier portrait qu'ait exécuté le peintre. De fait, les toiles immédiatement antérieures ont déjà une qualité sobre et directe, nouvelle ici. — Le voyageur avait il achevé son périple ? Ne s'était-il pas épuisé à rechercher le secret du génie ? Riche d'une science séculaire, allait-il reprendre son art à pied d'œuvre et nous dévoiler son propre secret ? Nous ignorerons toujours s'il faut condamner son exemple.

H. G.

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