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LES POEMES

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��Ch. Troufleau et Londres. De préférence au morceau poé- tique ils cultivent le grand poème. Nous ne saurions les en blâmer. Trop rares sont ceux qui voient grand à cette heure. — Mais il arrive dans leur cas que c'est aux dépens d'une certaine perfection dont ne se passe pas le poème. Contrairement au drame, le poème est un ouvrage qui se lit de près et qui doit dans la moindre de ses parties donner l'impression de la durée. A grand poème il faudra grand artiste et jusque dans le détail. Relisez un morceau d'Homère, de Virgile, de Dante — ou tout simplement de Hugo. Quelle continuité dans le chant ! Quelle perfection modulée ! Aussi bien le grand poème aura été dans tous les temps œuvre de maturité, non de jeunesse. Dès que le chant faiblit, ses pires ennemis s'y introduisent : prosaïsme et abstraction. J'ai déjà signalé ce double danger dans une récente chronique et m'excuse d'y revenir. Mais qui ne menace-t-il pas à l'heure où les jeunes générations tendent presque unanimement à réintellectualiser la poésie ?. . . Prosaïsme, abstraction, voilà les défauts principaux à différents degrés, des livres de MM. Barzun, Troufleau et Londres. Craignons pour eux que l'exécution ne desserve une trop ambitieuse con- ception.

M. Martin Barzun chante V Hymne des Forces '. Il ne rêve rien moins que la " synthèse dramatique " d'une évolution intérieure, mais transposée toute en lyrisme. Il fait parler Prométhée, Dieu, le prophète, l'athlète — et cependant c'est lui qui parle ; il fait parler les foules, et il parle en leur nom. Il ramène les forces antagonistes du drame aux types les plus généraux et les plus dépouillés de particularités physiques. Or croyant ainsi atteindre au lyrisme, il n'aboutit souvent qu'à la monotonie de l'abstrait.

Au long du temps et de P espace Se perpétue la lutte millénaire

' Mercure de France.

II

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