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CHRONIQUE DE CAERDAL l§§

cinq cent vingt ans après la mort du saint juge à Tunis ? Et toutes ses branches de chevalerie étaient mortes aussi.

Il fallait que cette fleur de seigneurie devînt, au cours des siècles, un prodige d'élégance légère et de vanité polie. Il fallait que le baron de France, ami du roi, tournât au prince de cour ; et que le roi lui-même, au lieu d'être le premier entre les nobles hommes, fût une idole dans un temple de secs courtisans à genoux. L'honneur des marquis, leur fidélité, leur plus beau courage même n'ont pas la vigueur première de la foi. Par ce qu'il fut, ce qui a été ne peut plus être. Mourir pour une cause est plus facile que d'y croire. Les saints Louis et les Joinville se font les uns les autres ; et le temps les défait ensemble. Joinville, paraissant soudain à Versailles, il eût été seul, et personne ne l'eût compris. Si on l'eût laissé faire, Soufflot eût mis un portique et des colonnes à la façade de Notre Dame.

L'œuvre des siècles est égale sur les hommes au travail des millénaires sur les formes de la nature. Le delta du Nil n'est plus semblable à ce qu'il fut : où il y eut la mer, il y a des plaines, des levées fertiles et des moissons. Le Pharaon n'en croirait pas ses yeux. Mais quoi c Saint Louis ne pourrait plus prendre la mer à Aiguës Mortes. Le limon du temps, ou bien sa dent de rat et sa cruelle lime, change les lieux et modifie les carac-

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