Page:NRF 8.djvu/1088

Cette page n’a pas encore été corrigée

I080 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

éloquence un peu terne, un peu enveloppée, qui avaient de l'agrément dans la Princesse Maleine, mais qui étouffent et glacent Joyselle ou Monna Vanna. Théâtre " littéraire ", en ceci que l'on s'achoppait à des phrases, aisément intelligibles si on les retournait deux ou trois fois dans son esprit, mais qui déci- dément bravaient l'acoustique d'une salle de spectacle. Lorsqu'un personnage s'écrie : Il y a toujours quelqu^un pour recueillir et nourrir par devers soi la souffrance dont un autre a fait fi, ou encore: Je ne serai pas tenté de chercher si je ne veux pas ce que je n^ accepte pas, je défie un auditeur non averti de saisir au passage le sens de ces mots. On peut relire une phrase de roman ; une phrase de drame, il faut qu'on puisse la comprendre en ne faisant usage que d'une moitié de son intelligence. Car pour ce qui est de l'autre moitié, les yeux occupés à suivre les jeux de scène en absorbent une partie et l'émotion d'assister à une aventure étonnante en paralyse le reste.

C'était là, si l'on veut, l'aspect ésotérique de La Lumière. Il y en avait un autre, un aspect proprement dramatique. Dans le premier acte surtout, des qualités de mise au point, une inven- tion d'épisodes significatifs, une justesse dans la conduite des scènes révélaient l'homme de théâtre. A côté des figures un peu conventionnelles du père et de la vieille amie de la famille (j'allais dire de la Nourrice), on rencontrait des personnages d'un réalisme déjà poussé, comme ce médecin qui fournit à l'ouvrage sa scène la plus émouvante, celle où l'aveugle-né raille avec une fine tristesse l'intervention du charlatan.

Si je suis revenu sur cette pièce de l'an dernier, c'est que j'y découvre les mêmes éléments qui font le fort et le faible de Dans Pombre des statues.

Au lever du rideau, un domestique en livrée essaie d'écon- duire un pauvre homme, quémandeur ou petit employé, qui insiste pour être admis auprès du maître de la maison. On est chez Robert Bailly, le fils du célèbre écrivain Emmanuel Bailly,

�� �