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96 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

route tantôt montait et tantôt descendait. De temps en temps, Ponceau en lâchait une bien bonne qui faisait éclater de rire Cougny et sourire, avec une expression de visage différente, Marcelle et Juliette : Marcelle, humble, soumise, Juliette sûre d'elle-même, comme triomphante. Mais, à ces moments, elles ne se regardaient pas l'une l'autre. Si Cougny se desséchait, Ponceau prenait une mine superbe à vivre comme un coq en pâte. Il était pour l'instant débarrassé de tous soucis. Lorsque Cougny l'interrogeait sur ses occupations à Paris, il répondait :

— Je suis représentant de commerce comme l'était ton frère.

C'est une profession qui, sans doute, laisse beau- coup de loisirs à ceux qui en ont besoin.

Quand les chevaux eurent marché, trotté, galopé pendant environ huit lieues, le soleil qui n'avait pas non plus perdu son temps, était beaucoup plus haut dans le ciel ; les ombres se faisaient de plus en plus courtes, mais aussi de plus en plus nettes. On suivit la rue principale d'une autre petite ville bâtie au milieu de chaumes arides, brûlés par le soleil. Mais, dès que l'on en était sorti, on entrait comme dans un pays d'eaux vives, telle- ment on apercevait de sources, de ruisseaux parmi les prés. Des bois de sapins apparurent sur des roches grisâtres. Le lac immense s'étendait entre des rivages imprécis, tel qu'un large fleuve, mais on l'entendait déferler avec un bruit semblable à celui de la mer.

Cougny sauta le premier de la voiture, solide et leste en apparence comme un jeune homme. Ponceau l'imita, puis ils reçurent dans leurs bras celui-ci Juliette, celui-là Marcelle. Le grand air les avait mis en appétit.

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