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paysans et les petites gens de village. Ce solitaire, pourquoi fait-il toujours crédit à l’assemblée des hommes ? Les fêtes populaires lui semblent les seules fêtes. Il pense là-dessus comme le peuple qui n’a point de joies, sinon communes. La vertu n’est, après tout, que la simplicité des mœurs. Et la douce manie de Jean-Jacques imagine des mœurs aimantes et fraternelles.

Rousseau est un prophète. Il parle naturellement pour les pauvres contre les riches, pour les petits contre les grands. Il est nourri de l’Évangile. Que Voltaire s’en moque.

Il a fort bien vu que l’amour et la joie des assemblées sont les deux instincts de la fête populaire. Ces amours brutes, mais sans fard, et plus honnêtes que grossières, il les compare aux intrigues des grands. Dans les salons, l’amour n’est qu’un passe-temps. La perfidie est une figure de la danse. Le plaisir seul est en cause ; et peut-être est-il vrai que le plaisir est aussi loin de l’amour que le duel de la vie héroïque.

Jouir de la vie et de l’amour sans nuire à personne, Jean-Jacques se fait cette idée de la vertu et de la bonté populaires. Il veut décidément que l’homme soit bon. Il veut, il sait que la nature est bonne. Et il la loue d’être simple. Il croit donc au peuple. Le peuple est la forme de sa charité. Il n’est pas peuple en tous ses instincts. Loin de là, comme tout artiste, il cache un aristo-