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DE JEAN-JACQUES


Vieilli avant l’âge, sombre et naïf, méfiant et crédule, douloureux surtout, je le vois dans son costume arménien, sur un chemin fleuri, à l’entrée d’un village. Les enfants se moquent de lui, et les passants haussent les épaules. Il porte le caftan et la robe noire, avec une ceinture. Sur sa tête ronde et forte, il a le bonnet persan ; la coiffe fourrée et pointue du derviche affaisse encore le front triste, sous les cheveux noirs, çà et là frangés d’argent, et donne un air de nécromant au visage taciturne. Il a répudié la perruque et la poudre. Il est bizarre et craintif, bourru et doux. Je vois son teint brun, sa figure pleine et grêlée, sa peau tannée par les voyages à pied, et cuite par les nuits à la belle étoile. Et ces grands yeux noirs, pleins de feu, luisent aux aguets, dans les créneaux des orbites, si vifs, si ardents, toujours mobiles, toujours inquiets, comme ceux de la bête prise au gîte, et qui auraient pu être si gais.

Il sent un peu l’urine, les sondes et la prostate.