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CHRONIQUE DE CAERDAL 85 I

bras nus, sauf une ou deux. La plupart sont nues aussi sous d'amples manteaux ouverts, qui laissent voir la gorge, et qui se ferment sur le ventre, au point où se rassemblent toutes les courbes frémis- santes de la chair, toutes les pentes de la vallée. La plus nue, la tête penchée, chante, et un bracelet de pierres précieuses brille à son poignet. Ses seins tendus reçoivent la caresse de son souffle.

Nul délire, nulle extase. La jouissance pure anime ces beaux corps. La volupté d'être soi, quand on est jeune et femme, et belle et noble. Leur gorge se gonfle, à ces belles, pour elles- mêmes se chanter. (Et derrière la toile, je distingue la volupté de les peindre, et de les posséder ainsi, comme l'artiste seul possède.)

Des trois plus séductrices, l'une, au fond, est assise, et pince du théorbe. Près d'elle, la plus belle, debout, chante en lisant le texte dans un livre, qu'elle appuyé sur son beau ventre d'ambre. Elle est longue, fine, et ses tendres seins ronds ont le galbe de la coupe et la fermeté souple du fruit.

La plus charmante, au premier plan, vêtue de brocart à ramages d'or et de soie changeante plus étroitement que toutes les autres, joue d'une viole couchée sur ses genoux. Elle tourne le dos ; mais sa figure ravissante regarde, en souriant à peine, de profil ; et à qui sourit-elle, cette Vénitienne d'Athènes et de Paris ? Elle a les traits les plus

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