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JULIETTE LA JOLIE 829

��Quand il y avait une course à faire, c'était à qui serait la première levée. Aujourd'hui les quatre ouvrières de M"* Clément, Juliette, Léontine, la Marie Belin et l'Agathe Rabeux étaient là. C'est une habitude que l'on a de faire précéder de l'article le nom propre ou le prénom. Juliette disait " l'Agathe " comme elle disait " le chat " ou " le chien ". L'article est un mot que l'on met devant les noms communs pour préciser leur signification ; mais ici l'on se connaît tellement les uns les autres que l'on traite les noms propres comme des noms communs. Plusieurs jeunes filles peuvent s'appeler Agathe, mais " l'Agathe " est celle avec qui travaille Juliette, " la Marie " aussi. Bien des jeunes gens portent les prénoms de Paul, de Louis, mais "le Paul,*' "le Louis" sont ceux que Juliette rencontre le plus souvent, ceux auxquels, lorsqu'elle en a le temps, elle pense le plus.

La Marie Belin et l'Agathe Rabeux étaient deux petites ouvrières assidues, les deux seules svu- qui M"* Clé- ment pût compter. Elles avaient à peine quatorze ans et portaient encore des jupes courtes. Pour elles, Juliette et Léontine étaient " des grandes, " de vraies jeunes filles, non pas tant à cause de leur âge que de leur liberté d'allures. Elles travaillaient toutes les quatre dans une grande chambre qu'on appelait l'atelier. Elles y avaient leurs aises ; la fenêtre, ouverte sur des jardins, des champs et des bois, laissait venir jusqu'à elles l'air et la lumière.

M^* Clément n'était pas fière avec elles. Jeune, et pour longtemps encore brune, elle vivait ici, depuis

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