CHRONIQUE DE CAERDAL 663
sourcils, le front modéré, les cheveux épais et abondants, la bouche forte et sensuelle, tout le visage moins ardent qu'un peu lourd et dense, le chevalier de Chateaubriand, ni fin, ni spirituel, ni mélancolique même, a comme un air de Rousseau précoce et de Marat adolescent.
Perdant du poil, il a pris du front en vieillissant. Son crâne a paru haut et long, noblement taillé en murailles abruptes aux tempes. Il s'est beaucoup affiné. Sa maigreur vive s'est appuyée solidement à la terre, et il a eu de la majesté. Sa bouche, comme d'un dédaigneux qui mord souvent ses lèvres et les cargue sur ses dents, était désabusée et bien amère. Mais son sourire, comme épris de plaire, a toujours été charmant. Les grands hommes exceptés, et d'abord Napoléon, Chateaubriand a gagné tous ceux qu'il s'est donné la peine de séduire.
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Homme sans souffrance, sinon de la vanité. Il est vrai que cette incurable maladie de peau cause des maux intolérables, et l'insomnie. Chateau- briand n'a jamais connu la douleur que d'être le second. Il ne vit donc que pour paraître le premier. Je ne suis pas fort sûr qu'il voulût plus que le paraître. Il borne à dessein son horizon, pour n'y pas être gêné par de trop larges ombres. Ainsi, il ne parle de Goethe qu'en passant, d'un
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