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CHRONIQUE DE CAERDAL 657

maison qu'on ne m'y invite ; et je n'y reste pas qu'on ne m'en prie. Je paie de la vie, sans doute, cette humeur farouche : chacun paie avec ce qu'il a. J'ai ma monnaie, qui n'a pas cours sur vos marchés, et que vos marchands ne pèsent pas. Elle a sa puissance, qui se moque de vos valeurs ; car c'est elle qui les fixe.

Je ne céderai pas aux puissances, quelles qu'elles soient ; et c'est en vertu d'une puissance secrète, qui règle ce que je veux des autres, sur ce que je me permets et sur ce que je leur ai permis. Ils me tueront, peut-être ; mais ils n'auront pas mon âme. Je suis celui qui ne recueille rien ; bien plus, celui dont le non ! est aussi immuable que la patience. J'ai toujours compté le succès pour rien. C'est peu de n'en point faire cas : je le méprise. Et même, ce succès, je le déteste. Je haïrais ceux qui le font, si je n'avais un tel mépris de ceux qui le contestent. Je ne porte pas, depuis quinze ans, ce casque de solitude et cette armure de silence pour me laisser tenter à ces vains tintements, aux sonnailles de la vache fortune, et aux crécelles de la louange. Il me faut d'autres victoires et d'autres voluptés. Je ne me rendrai pas aux sommations de la nécessité. Je juge le succès à l'argent qui le mesure. Et mon mépris est fondé là dessus.

J'étais donc, sans rien, dans cette Ville du

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