LA FÊTE ARABE 629
pollen des arbres mâles sur les fleurs des palmiers femelles, aplatir et rabattre les branches et disposer les régimes de façon à les présenter aux rayons brûlants du soleil. Cela demande des qualités naturelles d'agilité, de force, un long apprentissage. On est cultivateur de palmiers de père en fils, comme on est berger de moutons ou conducteur de caravanes. A Ben Nezouh, oii nous étions déjà dans des régions un peu froides, il fallait des soins infinis pour faire produire des fruits à ces arbres délicats. Les bons jardiniers n'étaient pas très nombreux. Eux partis, qu'arriva-t-il ? Les dattiers mal soignés dépérirent peu à peu. Ils com- mencèrent par ne plus donner de fruits, alors on leur coupa la tête pour en faire des arbres à vin, ce vin de palme un peu fade, mais qui n'est pas sans agrément ; puis les arbres déclinant de plus en plus, on en abattit un grand nombre pour employer leur tronc fibreux au coffrage des puits et à la construction des gourbis, et à leur place on vit pousser le triste peuplier d'Italie qui n'a fleurs ni fruits, pompe l'eau souterraine et ne donne aucune ombre, mais qui pour ces exilés est un rappel des vallées natales, le signe d'une prise de possession de la terre, une sorte de drapeau qu'ils plantaient sur l'oasis.
Avec cet arbre désolé, ils avaient introduit partout la chèvre fiévreuse de Malte et son frère le cochon noir, que vous avez vu barbottant dans les eaux ména2;ères et remuant du grouin les vases qui fermentent sous l'effroyable chaleur. Pour protéger les fruits immangeables qui pous- saient dans les vergers, toute la marmaille exotique donnait la chasse aux oiseaux ; ils tuaient à coup de sarbacanes tourterelles et boubéchirs, et ils en faisaient des brochettes avec le lard de leurs cochons.
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