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��PORTRAIT DE

JOACHIM DU BELLAY

��Il n'est pas parmi les plus grands, mais paimi les plus chers.

Au milieu de ce seizième siècle, si turbulent, si plein d'initiatives, d'élans, d'entreprises, — bien qu'il s'exalte de tous les enthousiasmes contempo- rains, — il reste solitaire, car il ne désire pas d'abord de vivre. Qui a vu son beau visage irré- gulier, si fin, si grave, mais comme détourné, comprendra ce désintéressement silencieux qui est en lui.

Il dédaigne facilement ; non par envie, ni par satisfaction de ce qu'il tient ; mais c'est pour se préserver. Il est choqué par les réalités de la vie, dont Ronsard à côté de lui s'accommode si gail- lardement. Ce n'est pas manque de générosité ; mais il a besoin de se garder contre les tentatives de l'extérieur ; il faut qu'il se protège lui-même comme une flamme pure et faible. Et, comme il n'a pas assez d'orgueil pour changer sa fragilité intime en un pessimisme universel, sans les accuser en eux-mêmes, sans prétendre diminuer leur valeur pour les autres, en silence, par quelque douce

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