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45 6 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

plus autochtone, moins entachée de rhétorique, désarme nos exigences par son sans-façon même ; elle ne prétend pas à la perfection, alors même qu'elle y atteint. Si naguère elle se haussa, si elle se guinda en des hymnes antiques qui, du reste, ne man- quaient ni de souffle, ni de pureté, — de cette ambition passagère elle n'eut pas de mal à faire son deuil, tant impérieuse, tant éperdue, sa force originelle la ramenait à son véritable chemin, celui de tous les jours. Un Paul Fort, fût-il par ailleurs le plus avisé des artistes, n'a qu'à vivre et chanter ; chanter sa vie. La matière de son lyrisme s'offre là sous sa main : promenades, rencontres, amours, chagrins, lubies ; elle est images et boutades, au petit bonheur des mots et des sons... Oh ! le charmant, l'insouciant trouvère ! Comme il va devant lui gaiement, insoucieux du mauvais pas, niant, d'une enjambée, l'obstacle. Il a le don. Qu'exigeons nous encore de lui ?

Erables d^or qui bercez, ce dimanche et le ciel pris blanc et bleu dans vos branches, le son offert d'une cloche chrétienne au bout du vent fait danser vos antennes.

Ces gaies païennes y ces folles cimes ivres dont chaque feuille s^ offre au vent qui délivre, donnant le mot d'amour a P arbre entier qui soudain s^offe au ciel tout dépouillé.

Au ciel chrétien s'offe des sons de cloche, au ciel payen s'offre un érable d'or, à notre amour un baiser s'offre encore, à l'univers l'uni- vers même s'offre. *

Voilà bien le ciel léger de France. De Senlis à Gonesse, à Jouy en Josas, Paul Fort joue au jeu de l'analogie, sans défor- mer le paysage...

Une petite file a traversé la route; son capuchon rouge prend des teintes pourpres. Elle passe calme sans s'effrayer de F automne radieux flambant tout autour (Telle. Pourquoi tant m' étonner des choses natu- relles ? *

La faculté d'étonnement n'est restée chez aucun si fraîche,

^ Ile de France, p. 175.

  • Idem, p. 181.

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