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LA FÊTE ARABE 43 I

vergers, où la signora Mammo m'avait fait prévoir des merveilles.

Sur le versant de la colline que je suivais pour m'y rendre, on avait planté des pins dont la verdure presque noire contrastait si bizarrement avec la lumière éclatante qu'au lieu de réjouir les yeux, ce sombre feuillage attristait, prenait un aspect funèbre. On y jouissait d'un peu d'om- bre, mais les brindilles qui tapissaient le sol mettaient le feu aux semelles. Beaucoup d'arbres d'ailleurs étaient morts, roussis, brûlés comme par un incendie.

A deux cents pas de là commençaient des étendues maraîchères, toutes pareilles à celles qu'on voit aux abords de nos grand'villes. Ah ! le triste spectacle, plus triste encore mille fois que celui de la ville ravagée ! L'Oued, divinité de ces lieux, bénédiction de ce village, source jaillie par miracle de ce désert brûlé, la Rivière des Déli- ces encombrée de lauriers et de rochers rougeâtres, où j'avais vu bondir le charmant cavalier, et les laveuses, jambes nues, rouler et dérouler avec leurs pieds adroits, leur linge sur les pierres polies, l'Oued n'avait plus ni lauriers, ni rochers. Sans doute les beaux lauriers-roses, qui buvaient l'eau par leurs racines, avaient paru malfai- sants aux nouveaux maîtres de Ben Nezouh, qui les avaient arrachés ; et l'on avait fait sauter les roches pour en utili- ser la pierre. Dans son vaste lit défleuri, le ruisseau ne formait plus que de petites mares croupies, reliées par de minces filets d'eau, où des cochons noirs se vautraient pour chercher un peu de fraîcheur. Quelques lamentables palmiers, dont on avait coupé la tête et d'où pendaient des feuilles desséchées, semblaient n'avoir été conservés que pour rappeler dans ces parages une flore disparue. De

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