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306 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Mais c'est grâce à un tel parti-pris que Brangwyn atteint son but, qui est de triompher du détail, en vue de ne pas nous distraire de son idée. Il faut convenir qu'il réussit à ne jamais être anecdotique, à ne pas nous donner des images. Point de pittoresque gratuit. Je ne vois pas que ces eaux-fortes aient surtout une valeur décorative, comme on a pu le dire — et je songe principalement aux nouvelles. Si je les considère toutes, elles trouent le mur : elles présentent un décor où s'inscrit un drame. Le drame est poignant, le décor est neuf et saisissant. Brangwyn a le goût de l'ordonnance. Il voit tout en le compo- sant. Et s'il est habile, c'est sans procédé, s'il sait faire mordre le zinc avec liberté, il manie le gravoir avec justesse et précision, sans mécanisme : le trait est nourri. Les eaux-fortes ne sont pas la traduction de dessins. Elles sont originales. Le dessin est soumis, obéissant, détendu, plus épanoui. L'eau-forte le con- tracte et le colore. Bref, si Brangwyn est virtuose, sa virtuosité n'est que celle de l'artisan.

Après avoir regardé toutes ces dentelles d'échafaudages, ces colonnes de fumées qui vont au ciel soutenir toute une archi- tecture de nuage, ces masses essuyées de pluie, ces cargaisons, ces chevalements, ces madriers, ces jambes de forces, ces pylônes, ces salissures, ces lumières qui éclatent comme un cri, toute cette géhenne des villes, suies et fumées, il me plaît de m'arré- ter devant cette route en Picardie d'un pathétique plus sobre, devant ce doux paysage d'Assise, où circule un peu d'air enfin!

Brangwyn est un grand voyageur.

Gaston Gallimard.

��BÉRÉNICE de M. Jlbéric Magnard, à l'Opéra Comique.

On sait la place importante et singulière qu'occupe M. Al- béric Magnard dans l'école française contemporaine. Des œuvres claires, vives, colorées, comme la Troisième Symphonie ; un peu

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