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" métier. " Même lorsqu’il excède la pure plastique, c’est encore à la vertu de l’eau-forte qu’il fait appel et jamais il ne cesse d’être un maître-artisan. Sinon des influences, des parentés tout au moins sont évidentes, mais qui ne parviennent pas à fausser sa personnalité : on se souvient de Rembrandt devant ces éclairages. Cette précise architecture, cette mathématique rapelle le Piranese des planches romaines. Et les noms de Daumier, de Millet s’éveillent aussi dans notre mémoire. C’est à Constantin Meunier que font penser certaines figures farouches, fortes comme des cariatides, hautes d’épaules et qui accrochent la lumière comme un arbre ou un rocher : un Ugolin, un Laocoon du Travail sortant sur un ciel encombré de nuages comme des colonnes d’émigrants en marche.

Brangwyn s’attarde peu aux paysages. Pour lui le monde est un chantier dont l’homme est l’ouvrier et l’esclave. Poète, à sa façon, des villes tentaculaires, c’est bien là ce qui me paraît le nœud, l’arête de sa volonté. De toutes ces gravures, cette idée se dégage : l’homme, homme-fourmi, façonné par son propre labeur, est partout écrasé, dominé, assujetti par ses oeuvres. Il rôde, fourbu, au pied des cathédrales, à la sortie des usines, à l’ombre de cette carène géante ; une ruine même est encore une architecture qui le défie : au milieu de ces décombres de Messine on oublie pourtant les éléments pour ne voir toujours que des pierres monumentales. Ailleurs un moulin devient aussi un monstre moderne :

" Et par les quais uniformes et mornes
Et par les ponts et par les rues
Se bousculent en leurs cohues
Sur des écrans de brumes crues
Des ombres et des ombres… "

Mais alors que Verhaeren célèbre des forces et des apothéoses, Brangwyn décrit froidement la peine de l’homme. C’est une constation qu’il fait et non pas une émotion qu’il ressent. Mais