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JULIETTE LA JOLIE IOO5

lard froid, d'œufs durs et de fromage. Ils buvaient un peu de piquette, et le puits de la Chipée était là pour un coup. Le Louis, s'il ne disait rien, n'en avait que plus de temps pour réfléchir. Son père le regardait à la dérobée.

C'était un homme qui ne se fâchait jamais, trouvant que tout marchait toujours à souhait. Il laissait sa femme parler, agir à sa guise. Il ne se reposait pas souvent, parce qu'il avait l'habitude du travail, qu'il n'aimait pas les changements. Il n'était pas ennemi des réjouissances publiques. Il trouvait tout naturel que chacun passât son temps, s'amusât comme il l'entendait, mais hier soir il ne s'était pas dérangé pour la retraite aux flambeaux parce que, les soirs d'été, personne n'aurait pu l'empêcher de fumer des cigarettes sur le pas de sa porte. Il ne s'était pas opposé à ce que sa femme allât chercher le gamin, comme elle l'appelait, à ce qu'elle le fît coucher tout de suite, à ce qu'elle l'amenât travailler aujourd'hui. Il ne s'était peut-être même aperçu de rien ?

La mère Catherine remuait son menton. L'âne regar- dait, écoutait. L'après-midi ils continuèrent de travailler, mais il disait vraiment chaud. Ils burent beaucoup d'eau du puits de la Chipée. Un peu avant le crépuscule on partit, la charrette chargée de blé. Frébault tenait l'âne par la bride : il ne s'agissait pas de faire un faux pas, de buter dans une ornière. Si la charrette s'était renversée avec toute sa charge, jamais l'âne n'aurait eu la force de se relever. Il ne faisait pas tout-à-fait nuit quand ils arri- vèrent en ville, mais on commençait à allumer les lam- pions.

En passant sous les Promenades, on rencontra les Gal- lois qui rentraient dîner. Le cœur du pauvre Louis se mij

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