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��NOTES

��SUR LA TOMBE DE BRUNETIERE.

On a souvent peine à voir en Brunetière autre chose que le polémiste passionné, prompt à l'affirmation et toujours prêt à écarter les objections d'un geste un peu trop autoritaire. Seul un homme qui l'avait longtemps fréquenté pouvait nous con- vaincre en parlant des hésitations de Brunetière. Voici comment s'est exprimé sur sa tombe son élève M. Joseph Bédier :

" Brunetière fut toujours possédé du désir de choisir entre les systèmes un système, et de s'y arrêter. Il s'y essaya plusieurs fois, avec des scrupules infinis. Il le savait bien, que quand il laissait se déployer la redoutable puissance dialectique qui était en lui, il suivait ses syllogismes jusqu'au bout, là où ils le menaient, et qu'il obéissait à leurs conclusions comme si elles eussent été des données immédiates de la conscience. De là son souci d'éprouver à fond chaque idée avant de la faire sienne, d'en faire le tour et de la pénétrer. Plusieurs fois pourtant, il crut se fixer en une doctrine définitive. Faut-il rappeler par exemple qu'en 1890 il donnait à la philosophie de Schopen- hauer une adhésion solennelle et retentissante, et qu'en 1892 encore, ayant loué Bayle " d'avoir afeanchi la morale des religions positives ", il appelait de ses vœux le jour, prochain, disait-il, " où ce philosophe oublié redeviendrait un maître des esprits ? " Mais ces systèmes ne lui fournirent que des abris provisoires. Il pouvait bien répéter à ses élèves le grand précepte :

Qu^ chacun dans sa loi cherche en paix la lumière ;

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