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d’ailleurs et furieux de leur expulsion, reviennent à la charge. Un d’eux lance un caillou sur la lanterne. Elle se brise avec fracas. Une troupe de jeunes gens tripolitains déboucha dans la place en chantant à tue-tête. Ils entourèrent les fils d’Albion, cherchant à les calmer. Mais les Anglais, dont la colère semblait augmenter, tombent à coups de poing sur les nouveaux arrivants et, en une seconde, la place devient le théâtre d’un combat acharné.

Ne concevant pas ce que des marins anglais en état d’ivresse pouvaient faire à cette heure de la nuit dans la maison du vizir, je demeurais pétrifié sur la place. Dans le mouvement de la lutte, un des marins m’asséna un coup de poing. Exaspéré par cet outrage, je tire mon kandjar et en frappe l’Anglais. Il tombe sur les genoux, mais, sortant de sa poche un pistolet, me le décharge en pleine poitrine. Mon manteau en poil de chameau arrêta la balle qui allait droit au cœur. La force du coup fut telle cependant, que je tombai sur mon séant. Des policiers, attirés par le bruit de la rixe, m’empoignèrent au collet et m’emmenèrent au corps de garde avec ma victime, dont la tête saignait, et ses deux camarades. Quant à mes mules et mes bagages, je ne sais ce qu’ils devinrent.

Nous fûmes jetés pêle-mêle dans un cachot. Plusieurs autres prisonniers s’y trouvaient déjà, accroupis sur une paille infecte.

Je m’assis, plongé dans les plus amères pensées et les suppositions les plus bizarres luttaient les unes contre les autres dans mon cerveau, lorsque je me sentis tirer doucement par la manche. Je reconnus le marchand de nougat que j’avais gratifié le jour même d’un doublon. Nous