d'une section d'infanterie 457
peu dormi. Un souffle de désespoir courut. Il sembla aux dormeurs qu'il ne leur restait plus qu'à mourir. Ils ne se sentaient plus le courage d'endurer le jour et de le conduire à sa fin. Les plus accablés se mirent sur leur séant, les sourcils froncés, tandis que le dégoût prenait des virations de vertige derrière leurs yeux.
Les jurons, où le Français met tout son génie de création verbale et qui sont le sel indispensable de son activité, ne parvenaient pas à percer ce brouillard au fond duquel chaviraient les têtes encore pleines de songe- ries. Le clairon, aigu et insinuant comme une vrille, n'y put rien non plus.
L'active se sentit enfin un cœur maternel. Les enfants de vingt ans, abreuvés la veille au compte des réservistes, mais dressés à cuver vite, sautèrent à bas de leurs lits : les pieds nus se mirent à courir sur le parquet avec un clapo- tement mat. Les gas démolirent les paquetages et mon- tèrent les sacs en affectant une agilité de prestidigitateurs. Les caporaux plièrent leurs draps sans desserrer les dents, se mirent rapidement en veste et s'en vinrent enfin aux pieds des lits, s'amusant à faire contraster la bonhomie de leurs sourires à demi imberbes avec le pouvoir de leurs deux galons rouges où pouvaient se lire le Conseil de guerre et Biribi.
Des irréductibles enfouissaient encore leur tête dans le traversin ; les enfants leur posaient la main sur l'épaule et leur criaient doucement dans l'oreille :
— Mon pot ! Hé, mon pot ! Faut se lever à c't* heure ! Debout, mon pot ! Tu vas te faire punir !
Enfin la réserve s'ébranla. Un grand cultivateur sortit des draps râpeux une paire de longues jambes maigres
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