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402 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Mais cette doctrine de l'Eglise catholique n'est pas aussi " ésotérique " que Patmore semble le croire. N'avons-nous pas assez entendu les libre-penseurs, en France, reprocher aux prêtres de corrompre les enfants, parce que les livres de piété catholique expriment l'amour divin avec les mots de l'amour humain ? Le propre de l'incroyance, justement, c'est de voir une contradiction entre ces deux choses ; entre le corps et l'esprit, comme si l'un et l'autre n'étaient pas l'œuvre du même créateur. Le mot de Mariage paraît indécent aux Femmes Savantes. Les matérialistes croient nous avoir désillusionnés quand ils nous ont montré l'origine matérielle d'un sentiment. Jules Laforgue dit : " l'amour maternel, amour tout d'albumine," et croit avoir dit quelque chose de très fort contre l'amour maternel. Il oublie que l'albumine et l'amour maternel ont la même origine. Pourquoi trouver le corps et ce qui est lié au corps des objets de scandale, alors que la vie, avec toutes ses possibilités, est contenue dans une goutte d'eau tiède ? alors que Dieu, quand il s'est donné pour le salut du monde, est venu parmi nous, comme nous, dans les ordures de l'accouchement ? Ce mépris — en réalité, cette peur — du corps et de la matière, sentiment exclusivement " classe-moyenne ", l'aristocrate, Patmore, ne l'a jamais éprouvé. Et c'est là le secret, en même temps, de sa poésie et de sa conversion.

Mais jusqu'au dernier moment, il hésita. D'abord, il eut à surmonter la désillusion que lui donna le spectacle de Rome ; puis, malgré les encouragements de la société catholique anglaise qu'il fréquentait, malgré les soins du P. Cardella, jésuite, qu'il avait pris pour conseiller, quelque chose en lui résistait. Une nuit enfin il comprit que le

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