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COVENTRY PATMORE 287

à la notoriété qu'il lui eût été si facile d'acquérir ? Uniquement : l'intérêt sexuel ; l'amour.

Il ne s'était pas, en effet, marié, comme beaucoup d'hommes, pour " faire une fin ". Son mariage était au contraire l'aventure culminante de sa jeunesse. Presque tous les poètes de génie sont des hommes qui ont gardé intacte leur sensibilité d'enfant. En Emily Andrews, il avait enfin rencontré la femme qu'il avait cherchée, en d'autres, toute sa vie. Lui aussi pouvait bien dire : " j'ai la fureur d'aimer ". Il désirait et possédait la femme avec tant de véhémence et de passion, un si furieux abandon de lui-même, une telle ardeur à servir et à protéger, qu'une seule femme lui suffisait, et que les seuls vœux indissolubles du mariage le pouvaient satisfaire. Pour lui, la femme était la seule raison de vivre : jamais il n'était rassasié de sa présence ; il l'aimait dans tous ses moments et dans toutes ses saisons. La femme est le centre de tout : c'est autour d'elle que se bâtit la maison. Et dans la maison grandissent ses enfants, la vie que l'homme, dans un instant de joie ineffable, lui a confiée. Le jour où l'église catholique vint confirmer Patmore dans sa croy- ance que l'amour humain est une préfiguration de l'amour divin, et qu'elle lui apprit que la Femme est l'image du Paradis, sa conversion fut consommée.

Je vois que la plupart des critiques qui se sont occupés de la vie de Patmore ont cherché à éclairer le plus possible le caractère des trois femmes auxquelles notre poëte lia successivement son existence. Cela me semble une recher- che inutile. Même Emily Patmore, la première, " l'Ange dans la Maison ", ne présente aucun de ces traits saillants qui grandissent une femme dans l'opinion du monde.

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