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234 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

marquant le commencement de la nuit. Nous veillerons, mes frères, et nous prierons pour ceux qu'il faut sauver.

Simon {à lui-même) — Bon, les voici maintenant qui parlent toutes à la fois, comme des tourterelles dans un tilleul. Le vent est à l'est ; demain matin il fera beau, et l'on verra encore le frère jardinier se promener au milieu des choux en cassant les fils de la Vierge avec le bout de ses sabots jaunes. Tant mieux, car ce n'est pas la besogne qui man- quera : des coups de marteau à donner, des mesures à prendre, des prières où il faudra mettre toute l'ardeur d'une tête reposée... Allons dormir.

Le Père Supérieur. — Quoi, Simon, est-ce vous qui parlez ainsi ?

Simon. — Est-ce vous, mon Père, qui proposez de veiller } qu'y a-t-il donc ce soir } un grand mal- heur menace-t-il de nouveau la patrie, ou si la maison de Dieu ne peut plus se garder elle-même, que les serviteurs doivent rester debout jusqu'au jour comme des chouettes } Cependant tout dort ; la mère s'endort sur son aiguille, le front lourd du bourdonnement de la lampe ; le sacristain remet la clef du clocher sur les fonts baptismaux ; le veilleur de nuit dans l'usine éteint la dernière lumière et se couche sur un sac auprès du mo- teur... Ecoutez ! c'est fini ; le vent retombe avec le dernier son, et c'est l'heure où les morts n'ont plus l'air de vivants qui sommeillent en plein

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