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2l6 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Le PÈRE Supérieur. — Traître !

Simon. — Ah ! quel est le traître, de nous deux, ou plutôt quel est le faible ? Homme à la vue courte, berger qui ne veut pas reconnaître qu'il a laissé entrer le loup ! Mais pourquoi pensez-vous donc que je vive dans l'église, et que je l'aime ? A cause que l'on y voit Dieu ? c'est à cause de ses pierres et de ses statues, à cause de la chanson de ses voussures, douce comme le violon de l'exilé quand ouvrant sa fenêtre il joue vers la mer, à cause de Salomé parce qu'elle danse sur les mains, et de Moïse lorsque, doré par le couchant, il semble descendre du Sinaï au crépuscule ! J'aime le double rayon d'or balancé d'une fenêtre à l'autre, et qui fait, en tapant les dalles, jaillir un flocon d'encens, comme on dit que la main des Saints fleurissait les roses ! J'aime les vitraux, pareils aux épées levées des archanges ; j'aime les toits verdis; et voulez-vous que je vous dise, mon Père ? le calice, le grand calice d'or qui disparut à Noël... c'est moi.

Tous. — Comment ^ Comment ? Qu'a-t-il dit.^* Blasphème !

Simon. — Il suffît que la perte du tabernacle ait été mal fermée ! On n'a qu'à lever la main, comme pour prendre le pot de sel sur l'étagère, et voyez donc ce qu'on rapporte chez soi : ce mer- veilleux ciboire, pourpre et doré, un peu vert dans les reflets, avec son blason seigneurial que ronge

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