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LA CRISE DE L ART DRAMATIQUE

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��sont loin de les offrir au dramaturge avec une égale abondance. Dans une époque policée, dogma- tique, les codes sociaux se formulent avec rigueur ; les usages, ailleurs flottants, s'y précisent en mille obligations et mille défenses ; c'est pour cela que notre art tragique du XVI P siècle a pu dresser des conflits nets, carrés, plus évidents, plus démon- stratifs que ne l'a fait aucun autre théâtre.^ Ce sont des heurts éclatants, des chocs de masses affrontées. Point d'échappatoires, point de tricheries, point même de ces progressives solutions'que le temps apporte à nos crises. La loi qui réduit à un jour le temps que doit durer l'action tragique, cette unité, la plus arbitraire des trois, la plus contraire à toute vérité humaine, n'a d'autre but que de ramener les conflits aux seuls mobiles conscients, aux arguments que trouve une imagination exaltée et non une sensibilité accommodante. Aussi comme chaque antagoniste analyse le fort et le faible de sa situation. Quels plaidoyers en règle ! L'action y perd en mystère, en angoisse, en réalisme ! Mais

' Ce n'est pas que les mœurs fussent meilleures, au contraire ! N'oublions pas que presque tous les écrivains du " grand siècle " se formèrent pendant la Fronde, c'est-à-dire pendant une des époques les plus désorganisées qu'ait connues notre histoire, ou qu'ils vieillirent au déclin du règne de Louis XIV qui fut un temps de profond désarroi. Mais si la pratique de la morale souffrait toute espèce de compromission, la théorie en restait intacte et le drama- turge pouvait, sans excès d'invraisemblance, y trouver une fière et féconde convention.

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