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694 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

sans vous, hors de vous, contre vous ; faites votre examen de conscience et réfléchissez.

Et si la Sorbonne réfléchit, comme elle a com- mencé à le faire, le livre d'Agathon ne lui fournira- t-il pas des occasions de contentement autant au moins que de remords ?

Le postulat continuel du livre est que l'influence de la Sorbonne, l'esprit de la Sorbonne, l'enseigne- ment des maîtres, les méthodes de travail qu'ils imposent, les idées personnelles qu'ils proposent, ont dans l'existence d'un étudiant une importance décisive, que d'eux dépendent une formation in- tellectuelle et morale. A qui le fera-t-on croire ? Un esprit vif et curieux, à vingt ans, se nourrit vingt fois plus de lectures que d'enseignement. Et il ne voit point dans une Sorbonne quelconque le centre de sa vie. Agathon le prouve par son exemple, dément par cet exemple même une partie de ce qu'il affirme.

Le meilleur état pour un jeune esprit est, je crois, de posséder des maîtres dont à la fois il puisse tirer parti et voir les lacunes ou les limites. Il faut que sa nourrice lui fournisse aussi des raisons pour la battre. Dans la mesure où l'origi- nalité s'apprend, en voilà la meilleure source. L'âme d'une génération se fait toujours à l'aide de quelqu'un et contre quelqu'un. Il est intéres- sant et point mauvais du tout que les mêmes maîtres rendent ce double service.

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