6o LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
Je resortis aussitôt dans le parc ; l'enfant clopin-clopant me guidait.
— C'est l'heure de la récréation, commençai-je. Il ne répondit rien. Je repris :
— Vous ne travaillez jamais après goûter ?
— Oh! si; mais aujourd'hui je n'avais plus rien à copier.
— Qu'est ce que vous copiez ainsi ?
— La thèse.
— Ah !... Après quelques tâtonnements je parvins à comprendre que cette thèse était un travail de l'abbé, que l'abbé faisait remettre au net et copier par l'enfant dont l'écriture était correcte. Il en tirait quatre grosses, dans quatre cahiers cartonnés dont chaque jour noircissait quel- ques pages. Casimir m'affirma du reste qu'il se plaisait beaucoup à " copier. "
— Mais pourquoi quatre fois ?
— Parce que je retiens difficilement.
— Vous comprenez ce que vous écrivez ?
— Quelquefois. D'autres fois l'abbé m'explique ; ou bien il dit que je comprendrai quand je serai plus grand.
L'abbé avait tout bonnement fait de son élève une manière de secrétaire-copiste. Est-ce ainsi qu'il entendait ses devoirs ? Je sentais mon cœur se gonfler et me propo- sai d'avoir incessamment avec lui une conversation tragi- que. L'indignation m'avait fait presser le pas inconsciem- ment ; Casimir prenait peine à me suivre ; je m'aperçus qu'il était en nage. Je lui tendis une main qu'il garda dans la sienne, clopinant à côté de moi tandis que je ralentis- sais mon allure.
— C'est votre seul travail, cette thèse ?
— Oh ! non, fit-il aussitôt; mais, en poussant plus loin
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