502 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE
Maurice. — Me marier, moi ?
Madame RevertÉgat, tout entière absorbée par le rêve qu'elle fait pour son client. — Oui, monsieur Maurice, vous marier... avec une gentille petite Grassoise. Il n'en manque pas qui seraient bien heureuses si vous les demandiez. Tenez, madem...
Maurice. — Taisez-vous, madame Revertégat, vous allez compromettre toute la haute société.
Madame Revertégat. — Vous êtes complaisant, gentil, vous parlez doucement aux dames... Ça ne serait pas difficile. Et vous resteriez dans le pays. Vous vien- driez, de temps en temps, le matin, acheter une jolie dorade ou une anguille, pour votre femme... Ah ! comme ce serait gentil... Au lieu d'aller vous fatiguer, à Paris...
Maurice, courageusement. — Ne me tentez point, madame Revertégat, mais montrez-moi plutôt, puisque aussi bien l'omnibus est là-haut, à m'espérer, les arapèdes dont madame Samat n'a pas râflé toute la provision.
Madame Revertégat. — Il n'en reste peut-être que deux hectos. i^Elle soulève une serpillière trempée qui repose sur une terrine et découvre^ enroulés (TalgueSy les précieux coquillages.) Les voilà, les pauvres. Voyez-les. Elles sont encore fraîches comme si on venait de les prendre sur le rocher, et tendres comme des huîtres. Des arapèdes comme cela, vous n'en trouveriez pas douze sur toute la côte.
Maurice. — Pourtant, j'en ai goûté à Marseille, chez Basso...
Madame Revertégat. — Ah ! vaï !... chez Basso ?... Je les connais. Ça a le goût de la semelle : c'est péché trop près du port. Les miennes viennent de la Croisette.
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