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ISABELLE 439

voisinage de ses livres à celui de sa femme) ; la porte de communication, dont j'avais soigneusement tiré le verrou pour me mettre à l'abri d'une surprise, avait un peu fléchi, et je m'étais assuré qu'immédiatement sous le chambranle je pouvais glisser mon regard ; il me fallait, pour y atteindre, me jucher sur une commode que j'avais poussée tout auprès.

A présent passait par cette fente un peu de lumière qui, renvoyée par le plafond blanc, me permettait de me guider. Je retrouvai tout comme je l'avais laissé dans le jour. Je me hissai sur la commode, plongeai mes regards dans la chambre voisine...

Isabelle de Saint-Avu"éol était là.

Elle était devant moi, à quelques pas de moi... Elle était assise sur un de ces disgracieux sièges bas sans dossier, qu'on appelait je crois des " poufs ", dont la présence étonnait un peu dans cette chambre ancienne et que je ne me souvenais point d'y avoir vu lorsque j'étais entré porter des fleurs. Madame Floche se tenait enfoncée dans un grand fauteuil en tapisserie ; une lampe posée sur un guéridon près du fauteuil les éclairait discrètement toutes deux. Isabelle me tournait le dos ; elle s'inclinait en avant, presque couchée sur les genoux de sa vieille tante, de sorte que d'abord je ne vis pas son visage ; mais bientôt elle releva la tête. Je m'attendais à la trouver davantage vieil- lie ; pourtant je reconnaissais à peine en elle la jeune fille du médaillon ; non moins belle sans doute, elle était d'une beauté très diflFérente, plus terrestre et comme humanisée; l'angélique candeur de la miniature le cédait à une lan- gueur passionnée, et je ne sais quel dégoût froissait le coin

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