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" Cet Impérialisme, dont nous ne désirons plus l’appareil de violence oppressive, nous a transmis un héritage moral dont nous nous refusons à rien laisser périr. Certes, nous ne songeons plus à réclamer le retour dans nos frontières de la République Cisalpine, des "Bouches du Tibre " ou de celles de Cattaro, non plus que de la Westphalie, de Burgos et de Rotterdam. Nous ne souhaitons pas faire rouler nos caissons sous les tilleuls berlinois. Mais il nous est impossible d’oublier qu’à Burgos, à Bruxelles, à Milan et à Berlin, il s’y rencontre une sorte de Francia irredenia, qui est la pensée française à l’étranger...

Nous avons fait assez longtemps assez de bruit par le monde pour que nos réformateurs soient accoutumés à ce que l’univers prête attention à ce qui se pratique chez nous. Je suis sûr que plus d’un serait bien déçu s’il savait que Copenhague, Buda-Pesth ou Rome ignorent délibérément nos tempêtes et dénoncent notre décadence irrémédiable...

Personne ne doit ignorer que cette enquête dans notre Empire cultural est lourde des conclusions les plus révolutionnaires. S’il en doit résulter la conviction que la France n’est plus écoutée, ni même entendue, c’est sans doute à ceux qui parlent le français en notre nom qu’il appartiendra d’en demander compte...

Ce n’est pas dire que l’étranger soit un juge infaillible. Mais, en somme, il s’est créé par le monde une république des esprits aussi internationale que les valeurs de bourse et les bulles pontificales. Et les jugements qu’elle porte ne sauraient plus être frappés de suspicion...

Il s’en suit que notre production est désormais soumise à une comparaison incessante. Et que si les hommes qui lisent trouvent ailleurs la nourriture que demande leur vie intérieure, c’est à cet ailleurs qu’ils iront, sans une hésitation, — sinon sans un regret.

Voilà pourquoi il nous importe de savoir avec précision si, oui ou non, l’étranger a condamné notre culture et nous oublie. Car la réponse à cette question comporte des sanctions décisives. Voilà pourquoi elle doit s’entourer de précau-