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278 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Mais j'aime à considérer William Ernest Henley, surtout, comme un valeureux redresseur de torts.

Si l'on examine l'ensemble de la critique littéraire de ce temps, on s'aperçoit qu'il y a une sorte de con- spiration des petits esprits pour rabaisser les grands hommes, leur trouver des tares, les dénigrer, pren- dre contre eux le parti du public le plus ignorant, ou en faire des cas pour la psychopathologie. Aux yeux des gens de Stratford, Shakespeare, de son vivant, n'était qu'un bourgeois enrichi, bon homme (puisqu'il leur prêtait de l'argent et leur payait à boire) mais assez noceur et coureur. C'est un peu de cela que l'on trouve chez les critiques ordinaires, cette " opinion publique " presque touchante à force de simplicité et de naïve sottise. Il est bon qu'un artiste daigne, de temps en temps, faire la police autour de la gloire de ses grands aînés, et qu'il disperse, même brutalement, les badauds attroupés qui font des réflexions saugrenues.

Et l'exemple, l'exemple donné par cette vigilance et cette intrépidité, voilà ce qu'il faut encore mettre au compte de W. E. Henley. Comme directeur de revue, il a encouragé les débuts de M. G. H. Wells et de plusieurs autres écrivains remarquables. Certes, il serait vain de chercher à faire de G. H. Wells le disciple de Henley. Mais le jeu ne romancier n'a-t-il pas profité des exhorta- tions du poète, et de l'enseignement qui se dégage de cette vigoureuse critique .

Valéry Larbaud.

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