son génie et ce qui est plus douloureux encore, un point d’arrêt, d’épuisement. Charles Péguy a parlé de doute, d’impuissance — je n’y contredis point. On est trop tenté de considérer les grands artistes du passé dans la brume d’or de la gloire, comme une race de demi-dieux qui exploitent à l’infini un fonds illimité, inépuisable, et qui mépriseraient, sans doute, les faiblesses de nos hommes de lettres d’aujourd’hui. S’il exista de ces héros en lesquels il semble que la mort seule ait pu figer l’irrésistible montée de la sève, le flux des mots, des formes, des idées, (tel un Shakespeare, tel un Beethoven, tel même un Hugo, un Corneille...) plus je lis Racine, plus je me rends compte qu’il n’est pas né de cette race-là. Ce ne fut ni un vaste esprit créateur, ni une grande âme généreuse, ni même un rhéteur débordant. Mais justement, moins ses dons premiers me paraîtront considérables, plus je m’étonnerai, j’admirerai, et jusqu’à l’émerveillement, que, de si peu, il ait su former des chefs-d’œuvre qu’aucun génie inspiré ne désavouerait.
Ici, M. Masson-Forestier proteste. On sait qu’il n’a détruit la fausse légende d’un Racine chrétien, que pour lui en substituer une autre qui ne paraît pas mieux : fondée celle d’un Racine en quelque sorte nietzschéen. Si nous voulons l’en croire. Racine aurait vécu la forte vie des hommes de la Renaissance italienne, celle de ses ancêtres