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I20 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

tendre cette sale histoire partout répétée... Assez long- temps sa dignité et sa hauteur m'ont humiliée : je tiens ma revanche enfin ! Et ne fronce pas les sourcils : tu ne comprends pas ? Tant pis ! D'ailleurs, j'ai besoin d'air et de distraction : toute la journée je suis restée ici à me morfondre... Ah ! si j'avais su... Allons ! sortons ! nous dînerons ensemble. Et sois tranquille, je n'oublierai pas Paulette. Pour rien au monde, je ne céderais ma place, je te le jure ! Il faut bien que je m'occupe, du reste, car, tu ne sais pas, me voilà libre désormais." Et avec une sorte de triviale désinvolture : " Oui, ma chère, ajouta-t- elle, entre Derlon et moi, tout est fini depuis ce matin..."

Quels yeux Boboli ouvrit ! "Brouillée avec Derlon ?"

En riant, l'Ombrageuse lui prit le menton : " Com- ment, cela aussi te porte un coup ! Quel petit cœur sensible ; on ne sait plus par où te prendre... Lis ceci, et il ne me restera plus rien, ensuite, à te révéler... " Et ayant jeté une lettre froissée sur les genoux de la jeune femme, elle passa dans la chambre voisine.

Etourdie de tant d'événements et de secousses, Boboli demeura les yeux fixés sur le papier qu'Isabelle venait de lui confier. Ses paupières battaient. Il lui fallut un moment pour déchiflFrer la signature du Comte au bas de ces feuillets, tout couverts d'une écriture serrée et tourmentée :

" Ma chère Isabelle, écrivait Derlon, je m'en vais

  • ' dans une heure ; l'avenir seul dira si c'est pour ne plus

" vous revoir. Avant de mettre à exécution une si grave " résolution, il aurait convenu de vous exposer les motifs " qui me l'ont imposée : je m'en rends bien compte ; " excusez-moi de n'en rien faire. En me dérobant à

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