ce trajet, on l’acclame et il salue. Il salue, c’est-à-dire qu’il s’arrête, hausse le buste, allonge le cou et regarde la foule d’un air réjoui, — puis par deux fois, d’un mouvement de tête court et automatique, il fait signe que oui.
— Une mâchoire de dogue et d’homme politique ; des yeux de myope, rougis et enfoncés ; des cheveux blonds, qui donnent à ce chasseur un air puéril.
— Son teint rouge et tanné de paysan inspire la confiance, le fait ressembler, dans sa redingote trop large, à un riche fermier, le dimanche, au temple, ou à un clergyman qui serait cultivateur.
— Il ne s’est pas « arrêté longuement à contempler la fresque de Puvis de Chavannes », comme l’ont imaginé les journaux. Il a rapidement reconnu la place, et s’est installé dans le fauteuil, puis, sans prendre garde aux applaudissements amusés, il a saisi la bouteille sur la table et l’a débouchée entre ses genoux.
— « Vous êtes un rude soldat… Vous êtes un Homme Représentatif ! » lui dit M. le Vice-Recteur. Et Roosevelt se dresse, ses notes à la main.
— Son action oratoire est mouvementée à l’excès. Il brandit au-dessus de sa tête un paquet de notes. Il prend à partie ce notable sur l’estrade, puis cet étudiant, là-bas, tout au fond des tribunes… Dans sa République, peut-être, comme à Rome, au temps de Menenius Agrippa, l’art de la parole est encore tout neuf ; et cette gesticulation paraît sans doute bien pathétique aux « rudes trafiquants » des villes de l’ouest.
— Je retrouve, malgré moi, tels que je les ai vus dans les magazines américains, les différents temps de son geste favori décomposé comme le coup d’aile d’un oiseau lourd.
— Il lève le bras, et sa manchette, mal fixée, se détache. Ainsi, les dimanches soir, aux carrefours de Londres, des clergymen de fortune secouent leur auditoire austère et naïf avec de grands gestes violents, des images usées…
— « Est-ce qu’il parle de Whitman ? » me demande tout bas mon voisin, qui est poète.