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QUELQUES PROPOS DE WALT WHITMAN 745

pair, c'est la qualité personnelle que sut y manifester celui qui le rédigea. Il put se trouver avant lui des confidents qui pénétrèrent aussi avant dans l'âme d'un grand homme, d'autres qui prouvèrent une affection aussi invariable, d'autres encore qui s'attestèrent aussi maîtres de leur langue : mais je n'en connais pas un qui ait su se montrer, au même degré que l'auteur des Chants Communal, intuitif, aimant et artiste, sans cesser un moment d'être véridique. Horace Traubel, visiteur quotidien du sage de Camden — et par de merveilleuses affinités son alter ego — nous introduit dans la chambre même ou s'écoulèrent les dernières années du poète perclus, et il en a si merveilleusement traduit V atmosphère, sans nul effort descriptif, que nous nous imaginons être devant celui-ci face a face et prendre part à l'entretien. Entre autres mérites il pos- sède l'art de s'effacer tout en étant présent pour laisse? Walt s'offrira nous sans intermédiaire, dans ses paroles et les traits de son visage ; il connaît l'importance du plus minime détail dans le tableau, mais sans jamais perdre de vue l'ensemble. Par dessus tout il est souve- rainement respectueux du vrai, quel qu'il soit. Un soir de la fin d'octobre 1888 le vieillard avait dit à Traubel : " Vous parlerez pour moi maintes fois après ma mort : n'ayez pas peur de dire la vérité — n'im- porte quel genre de vérité^ bonne ou mauvaise, pour ou contre. La seule crainte que vous deviez avoir, c'est de ne pas dire la vérité. " Et l'ami qui avait promis ce soir-là " de ne pas contribuer à le faire entrer dans

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