G. DEHERME ET LA CRISE SOCIALE 58 1
des hommes de bonne volonté. " Parce qu'il avait senti la vanité des doctrines, le néant de beaucoup de phrases parlées ou écrites, il disait encore : " Apprenons à apprendre. Estimons notre ennemi s'il y a lieu. Ne fermons pas les yeux pour mieux voir. Toute vérité est bonne à dire. " A l'image de cette petite maison qu'il avait bâtie, on en construisit hâtivement cent autres, mille autres, et il n'est pas bien sûr que l'on y parlât toujours aussi raisonnablement. D'ailleurs on a vu tout cela en son temps.
Mais aujourd'hui il y a autre chose : Deherme et son œuvre d'un côté, et de l'autre les hommes qui sont venus à lui, qu'il a réunis, et qui maintenant disent : " Nous ne voulons pas de sa morale. " Faut-il raconter l'histoire triste de ces incidents, comment on sacrifia l'édificateur sévère à un homme qui passait portant de l'or et des plaisirs faciles ? Faut-il chercher, ici ou là, une vérité solide ? A quoi bon ! Deherme lui-même doit être bien las. Notons seulement l'attitude de ceux qui se sont institués Voix du peuple. Ah ! comme on l'a abandonné avec calme, cet homme qui voulait pour les autres la même honnê- teté, la même discipline que pour soi-même. Les plus honteux ont dit : " Nous restons neutres... "
11 eût été dur pour Deherme de sentir crouler son oeuvre, après des années de patient effort ; mais il lui fut incomparablement plus dur de se la voir dérober, de la savoir faussée dans son principe, détournée de son but. Un tel désastre, survenant à l'âge mûr, marque un homme pour la vie. La crise dont il a souffert rendra désormais Deherme attentif à tous les signes de crise, à tous les désor- dres de notre temps. Mais elle le rend aussi plus amer, et parfois jusqu'à l'injustice. A lire la Revue qu'il intitule encore La Coopération des Idées (bien qu'il la rédige à peu près seul,) j'ai plus d'une fois
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