plaines où l’herbe haute et les arbres tremblottaient en un mirage comme s’ils appartenaient à un paysage sous- marin ; elle campait le long des creeks où les canards, les becs-cuillers au plumage blanc, les grues gris perle vivaient en paix. Elle avait traversé une ville de 3000 habitants où elle avait été épeurée de voir tant de gens à la fois, tant de chevaux et tant de maisons ; elle avait vu le Darling où passaient des bateaux à vapeur remorquant des barges chargées de balles de laine qui s’en allaient en Victoria, à 800 milles de là.
Son père lui avait montré les grands hangars où l’on tondait les moutons et le bruit des machines l’avait effarée ; elle avait aperçu, cachée dans un jardin planté d’orangers et de fleurs de toutes couleurs — la maison d’un squatter, propriétaire d’un million d’acres et de 200.000 moutons.
Jones aimait l’enfant davantage chaque jour car elle était sa compagne, son camarade, et égayait la monotonie de la route et le grand silence du bush. Elle était devenue une petite ménagère intelligente, s’occupait de la cuisine et savait même faire des gâteaux qu’elle cuisait dans le four de camp. Elle l’aidait à ramener les chevaux et à les harnacher, et savonnait la lessive le dimanche matin alors qu’on campait pour se reposer.
Un jour Jones laissa à Jessie la garde du camp, et partit dès le petit jour sur son cheval : au coucher du soleil il revint après avoir fait 50 miles. Une raison majeure l’avait poussé à faire ce raid, il n’avait plus de tabac et pour la première fois dans sa vie d’homme, il avait dû rester quatre heures sans fumer sa pipe.
Le charretier s’était chargé de son éducation ; il lui avait appris à lire, avec les réclames des journaux vieux de