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que Marie Donadieu y avait cueilli une grappe de fleurs, malgré les injures que lui criait un collégien penché à une fenêtre.

Aujourd’hui, les grappes de glycines s’étalaient comme autrefois sur le mur et la grille, mais toutes les fenêtres de la maison étaient closes, et rien n’y vivait. Cela n’empêcha pas Philippe de dire au collégien que, s’il le tenait au bout de son soulier, il l’enverrait bien loin. Et il lançait son pied comme si le collégien était au bout. Sa colère douloureuse était en même temps si comique que ses amis riaient de bon cœur. Il se mit à rire aussi avec eux, et au milieu de sa gaieté tout à coup revenue, il se retournait vers la maison pour crier, “ Sale petit bourgeois, vilain petit monsieur ! ”

Il avait dans sa poche ce jour-là le quatrième chapitre du “ Père Perdrix ”. Charles et Michel voulaient s’asseoir commodément sous les peupliers pour en entendre la lecture, mais lui ne trouvait pas de place à sa convenance. Il finit par s’adosser à une palissade et il dit :

— Il y a déjà un bon repas dans mon chapitre ; nous pouvons bien nous passer de sièges.

Il lisait avec une voix un peu grêle et qui montait parfois comme un chant.


Le “ Père Perdrix ” parut cette année-là, et l’année suivante ce fut Marie Donadieu. Contre son habitude, il n’avait pas lu un à un les chapitres à ses amis. “ J’ai fait une Marie Donadieu que vous ne connaissez pas ”, disait-il.

Quelques jours avant la publication du livre, il dit à la couturière :

— Il me vient des idées comme aux bonnes femmes de