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II
CHARLES BLANCHARD

quand le Messie serait venu. Elle ne se disait pas qu'il y aurait encore bien des combats à soutenir avant le jour de sa gloire. L'ordre nouveau allait être établi ; il n'y aurait plus qu'à le recevoir, un grand silence allait régner sur le monde et serait celui de la Paix.

— Mon petit va entrer en apprentissage. Il saura travailler. Chaque soir il aura gagné sa journée...

La douzième année se fit longtemps attendre. Jamais Solange ne perdit courage. Elle fermait les deux yeux pour être toute seule avec sa foi. Chaque matin dans son corps elle sentait un mouvement plus facile, dans son cœur elle entendait un son plus clair ; chaque soir, le jour en s'en allant l'avait soulagée de tout le poids d'une journée de sa vie passée. La douzième année s'avançait avec lenteur, car le bonheur est notre maître et prend son temps, mais elle savait que l'on peut compter sur lui. Du reste, il s'était déjà mis en route.

Ce fut un beau matin que celui où elle regarda autour d'elle. Douze ans plus tôt elle avait mis un enfant au monde. Elle ne savait pas alors qu'elle serait si malheureuse. Chaque jour, avec une horrible fidélité, avait été l'un des jours d'une vie désolée. Elle ne prévoyait pas alors qu'un jour elle serait si heureuse. Lorsqu'elle se leva, le