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LE LYRISME DE GŒTHE 95

lui-même : " Souvent il me semble, fera-t-il dire à Wilhelm Meister, qu'un génie secret me va chu- chotant quelque chose de rythmique, si bien que dans mes promenades je me meus en mesure, et crois en même temps percevoir des sons légers, accompagnement d'un lied qui bientôt surgit en moi complaisamment. " Ce génie le visite à l'im- proviste, souvent contre son vouloir, à toute heure de veille ou même de sommeil, et son passage est parfois si rapide que maint poème non écrit se trouve aussitôt oublié ; mais chaque visite accroît chez Gœthe la confiance en un mystérieux pouvoir qui soixante années restera son hôte, toujours fidèle, bien que toujours capricieux.

A cet éternel amoureux, l'inspiration dicte d'abord des vers d'amour ; ce sont eux qui domi- nent, dans la période qui va de la dix-neuvième à la vingt-septième année, comprenant les semestres d'études à Leipzig et à Strasbourg, le séjour à Wetzlar, le retour à FrancfiDrt, l'installation à Weimar. Parmi ces poèmes, certains, d'une gentil- lesse moins juvénile que puérile, ressemblent de trop près aux jeux de société dont ils perpétuent le souvenir ; mais dans les autres, moins frivoles, tantôt éclate une impatiente ardeur, tantôt palpite une extase ravie qui voudrait suspendre le vol du temps, tantôt soupire une douleur mêlée d'angoisse ou de remords ; tous ont un charme de franchise, de hardiesse ingénue et de simplicité : ce jeune

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