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LA CAPTIVE DES BORROMEES 529

clef, il ne me tardait plus que de la presser de questions. Et puis, s'il faut tout dire, à la grâce de la dame, à son expression mêlée de langueur et de vivacité, à la flamme contenue qui brillait sous ses paupières, j'avais cessé d'être insensible. Je lui pris la main et avec chaleur, la priai tout d'abord d'excuser ma méfiance et la rigueur de mon accueil. — Mais depuis quelques heures, continuai-je, je marche dans un imbroglio où je me perds. Tout à mes yeux prévenus n'est plus que déception et surprise. Aussi bien, madame, s'il est en votre pouvoir, hâtez-vous, je vous en conjure, de mettre fin à un désordre que je ne

saurais endurer davantage Oui, pourquoi le nierais-je,

cette jeune infortunée que le Comte détient contre son gré, j'avais projeté de la soustraire au honteux esclavage où elle languit. Une barque, apostée par mes soins au pied des terrasses, devait à la pointe du jour la mener ici même. Ce matin cependant, j'eus l'étonnement de constater ensemble et que le bateau avait disparu et que

la dame contre toute attente était toujours au château

— Ma foi, monsieur, fit-elle à cet endroit, peut-être jugerez-vous qu'il y a moins sujet d'admirer qu'elle n'ait pas suivi vos avis lorsque vous saurez que c'est à moi qu'hier, dans le pavillon des Indes, vous les avez com- muniqués... — Eperdu et sentant à ces mots renaître toutes mes incertitudes : — A vous ! fis-je. Comment, c'était vous, cette femme voilée à qui je parlai... Mais, au nom du Ciel, qui êtes-vous alors et qui est Délia ? — Eh, monsieur, fît-elle en m'arrêtant, laissez là cette fille, elle ne mérite point d'occuper votre esprit... — Et là-dessus, toute amusée de mon ébahissement, elle me révéla que j'avais en face de moi la captive anglaise qu'un

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